LES ANTIDÉPRESSEURS AU SECOURS DES PATIENTS ATTEINTS DE SYNDROMES MYÉLODYSPLASIQUES

LES ANTIDÉPRESSEURS AU SECOURS DES PATIENTS ATTEINTS DE SYNDROMES MYÉLODYSPLASIQUES

Les syndromes myélodysplasiques (environ 4 000 nouveaux cas par an) sont des maladies de la moelle osseuse qui se traduisent par une production insuffisante de cellules sanguines matures saines, couplé à un taux de sérotonine inférieur à la normale. Pourtant, la sérotonine est indispensable pour une fabrication optimale des globules rouges. Et si les antidépresseurs, composés de sérotonine, permettaient à l’organisme de reproduire des globules rouges sains ?

La sérotonine est principalement connue pour réguler nos humeurs. Mais en découvrant que cette molécule est produite au sein de la moelle osseuse et peut agir sur la production des cellules sanguines, des équipes de l’Inserm, de l’Université Paris-Descartes, de l’Institut Imagine et du service d’hématologie de l’hôpital Necker – Enfants malades AP-HP dirigé par le Professeur Olivier Hermine*, révèlent une nouvelle piste thérapeutique pour les syndromes myélodysplasiques, dans Cell Reports.

Tout est parti d’un constat : les patients atteints de syndromes myélodysplasiques ont un taux de sérotonine inférieur à la normale. Et cette déficience semble agir sur la production des cellules sanguines matures, qui est d’ailleurs l’une des caractéristiques de ces pathologies.

Les syndromes myélodysplasiques sont associés à un défaut de la lignée des globules rouges

L’origine des syndromes myélodysplasiques est liée à une anomalie de cellules progénitrices dans la moelle osseuse, au coeur des os. Avant de devenir globules rouges, globules blancs ou plaquettes, les cellules passent par toute une série d’étapes de maturation à partir de ces cellules progénitrices. En l’occurrence, c’est une défaillance au niveau des cellules progénitrices de la lignée des globules rouges qui est observée chez les patients atteints de syndromes myélodysplasiques. Ainsi, ces patients souffrent d’anémie, ce qui nécessite des transfusions régulières et parfois un traitement par érythropoïétine (EPO). En 2012, plus de 4 000 nouveaux cas de syndromes myélodysplasiques ont été diagnostiqués. Ces maladies sont associées à un assez mauvais pronostic, en partie lié aux complications de l’anémie et de ses traitements, mais aussi en raison d’un risque de leucémie aiguë d’environ 30%, avec une survie à 5 ans de l’ordre de 40% en France.

Augmenter le taux de sérotonine pour corriger l’anémie

L’équipe a réussi à démontrer que la sérotonine, une molécule fabriquée par le cerveau et l’intestin, est aussi produite au sein de la moelle osseuse, et qu’elle est indispensable pour une fabrication optimale des globules rouges.

« Dans les modèles animaux, l’action combinée de l’EPO et de la sérotonine améliore l’anémie. En cas de carence en sérotonine, l’administration d’un antidépresseur, comme la fluoxétine, en augmentant les taux de sérotonine, semble pouvoir restaurer le bon fonctionnement de la cellule progénitrice et augmenter la production de globules rouges sains. »

note Francine Côté@, chercheur CNRS dans l’équipe du Pr Olivier Hermine* (Inserm/Université Paris Descartes)

Ainsi, ces recherches suggèrent que la correction du taux de sérotonine chez les patients atteints de syndromes myélodysplasiques, par exemple par un traitement antidépresseur, pourrait permettre une amélioration de leur anémie. Les chercheurs précisent que les antidépresseurs n’ont d’effet que lorsqu’il existe un défaut de fabrication des globules rouges lié à une carence en sérotonine, et donc n’entraînent pas de sur-production de ces cellules.

Comment les syndromes myélodysplasiques éclairent d’un jour nouveau l’action des antidépresseurs

En plus de cette nouvelle piste thérapeutique, cette action jusqu’ici inconnue des antidépresseurs pourrait s’appliquer à d’autres situations d’anémie. L’équipe cherche donc actuellement si d’autres maladies de la moelle osseuse sont associées à une carence en sérotonine, et pourraient ainsi également bénéficier de l’utilisation d’antidépresseurs.

Sources : Enhanced renewal of erythroid progenitors in myelodysplastic anemia by peripheral serotonin ⎢David Sibon, Tereza Coman, Julien Rossignol, Mathilde Lamarque, Olivier Kosmider, Elisa Bayard, Guillemette Fouquet, Rachel Rignault, Selin Topçu, Pierre Bonneau, Florence Bernex, Michael Dussiot, Kathy Deroy, Laetitia Laurent, Jacques Callebert, Jean-Marie Launay, Sophie Georgin-Lavialle, Geneviève Courtois, Luc Maroteaux, Cathy Vaillancourt, Michaela Fontenay, Olivier Hermine & Francine Côté Cell Reports. (2019).

Contacts scientifiques

@ Francine Côté : francine.cote@parisdescartes.fr

*Olivier Hermine : olivier.hermine@institutimagine.org

Olivier Hermine est professeur à l’Université Paris Descartes, praticien hospitalier et chef du serviced’hématologie adulte à l’Hôpital Universitaire Necker-Enfants malades AP-HP, docteur ès sciences, responsable d’un groupe de recherche Inserm à l’Institut Imagine, et coordinateur du Labex Grex.


Contacts presse

Béatrice Parinello-Froment, beatriceparrinello@bpfconseil.com, 06 63 72 16 06

Justine Germond, justine@bpfconseil.com, 06 30 19 79 77


À propos de l’AP-HP :

L’AP-HP est le premier centre hospitalier universitaire d’Europe, organisé autour des 7 Universités de Paris et de la région Ile-de-France. Elle est étroitement liée à tous les grands organismes de recherche (CNRS, INSERM, CEA, INRA, Institut Pasteur, etc.) dans le cadre d’unités mixtes de recherche de ses 10 groupes hospitaliers. Elle compte trois Instituts Hospitalo-Universitaires d’envergure mondiale. Acteur majeur de la recherche appliquée et de l’innovation en santé, le CHU de Paris a créé un maillage de structures d’appui à l’organisation de la recherche et à l’investigation : 14 unités de recherche clinique, 17 centres d’investigation clinique, 4 centres de recherche clinique et 2 centres pour les essais précoces, 12 plateformes de collections biologiques, 2 sites intégrés de recherche sur le cancer, un entrepôt de données de santé recueillant les données de soins des 8 millions de patients vus chaque année. Les chercheurs de l’AP-HP signent annuellement près de 10 000 publications scientifiques et plus de 4 450 projets de recherche sont aujourd’hui en cours de développement, à promotion académique ou industrielle, nationaux, européens et internationaux. Détentrice d’un portefeuille de plus de 500 brevets, de bases de données et de matériels biologiques uniques, l’AP-HP valorise les travaux de recherche remarquables des biologistes et cliniciens chercheurs de ses hôpitaux. Près de la moitié des innovations brevetées sont licenciées à des entreprises du monde entier et sont à l’origine de la création de près de 60 jeunes entreprises. http://www.aphp.fr

À propos de l’Hôpital universitaire Necker-Enfants malades AP-HP :

L’hôpital universitaire Necker-Enfants malades propose l’ensemble des spécialités médicales et chirurgicales pédiatriques, un service d’accueil des urgences pédiatriques, une maternité de type 3 et des services adultes très spécialisés (néphrologie, transplantation rénale, hématologie, maladies infectieuses). Il est le siège du SAMU 75, AP-HP. Hôpital de recours pour le traitement de pathologies lourdes et complexes, ses équipes ont développé une approche médicale de haut niveau grâce à la forte synergie entre les unités cliniques, le plateau technique et les unités de recherche qui font de l’hôpital un acteur important de la recherche clinique avec plus de 500 projets en cours. Il abrite près de 60 centres de référence ou de compétence de maladies rares. Ses 5 000 professionnels prennent en charge plus de 500 000 patients par an, dont près de 17% viennent de province ou de l’étranger.

À propos de l’Université Paris Descartes :

L’Université Paris Descartes, l’université des sciences de l’Homme et de la santé à Paris. Avec ses 9 Unités de Formation et de Recherche (UFR) et son IUT, l’Université Paris Descartes couvre l’ensemble des connaissances en sciences de l’Homme et de la santé. Seule université francilienne réunissant médecine, pharmacie, dentaire et maïeutique, son pôle santé est internationalement reconnu pour la qualité de ses formations et l’excellence de sa recherche.

À propos du Centre national de la recherche scientifique :

Créé en 1939, le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) est une institution de recherche parmi les plus importantes au monde. Internationalement reconnu pour l’excellence de ses travaux scientifiques, le CNRS est une référence aussi bien dans l’univers de la recherche et développement que pour le grand public. Pour relever les grands défis présents et à venir, ses scientifiques explorent le vivant, la matière, l’Univers et le fonctionnement des sociétés humaines.

Avec 33 000 personnes et un budget de 3,3 milliards d’euros, le CNRS exerce son activité dans tous les champs de la connaissance, en s’appuyant sur plus de 1100 laboratoires en France et à l’étranger. Il mène des recherches dans l’ensemble des domaines scientifiques, technologiques et sociétaux : mathématiques, physique, sciences et technologies de l’information et de la communication, physique nucléaire et des hautes énergies, sciences de la planète et de l’Univers, chimie, sciences du vivant, sciences humaines et sociales, environnement et ingénierie.

Le 19 octobre 2019, le CNRS fêtera ses 80 ans d’existence, 80 ans à bâtir de nouveaux mondes et à accompagner les mutations de la société. Cette année-anniversaire est l’occasion de célébrer, en France et à l’étranger, les valeurs qui sont au fondement du CNRS : la liberté de la recherche, l’avancée des connaissances, le travail en équipe, l’excellence scientifique, l’innovation et le transfert, le progrès social, et la diffusion de la culture scientifique.

À propos de l’Institut Imagine :

Premier pôle européen de recherche, de soins et d’enseignement sur les maladies génétiques, l’Institut Imagine a pour mission de les comprendre et les guérir. L’Institut rassemble 900 des meilleurs médecins, chercheurs et personnels de santé dans une architecture créatrice de synergies. C’est ce continuum inédit d’expertises, associé à la proximité des patients, qui permet à Imagine d’accélérer les découvertes et leurs applications au bénéfice des malades. L’Institut a été labélisé « Tremplin Carnot » en 2016 par le Ministère de l’Education nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. www.institutimagine.org