Microbes, virus, champignons et autres parasites : notre corps sait normalement se défendre face à ces agresseurs. Une partie de notre système immunitaire, dite immunité adaptative, s’est enrichie et diversifiée au cours de notre vie afin d’identifier et neutraliser ces agents étrangers.
A la surface des lymphocytes B et T qui constituent cette immunité adaptative, on trouve de très nombreux récepteurs spécifiques à chaque pathogène. On doit ce répertoire, c’est-à-dire la diversité de ces récepteurs, à un mécanisme de recombinaison de l’ADN appelé V(D)J. Ce sont les facteurs RAG1 et RAG2 qui initient ce processus indispensable au développement des cellules de l’immunité adaptative par l’introduction d’une cassure de l’ADN qui sera ensuite réparée par la machinerie générale de prise en charge des dommages de l’ADN. Les mutations des gènes codant pour ces différents facteurs sont connues pour être responsables de nombreux déficits immunitaires, certaines anomalies du développement et la prédisposition à développer certains types de cancers.
Le laboratoire de Patrick Revy et Jean-Pierre de Villartay à l’Institut Imagine -AP-HP, Inserm, Université Paris Descartes – à l’hôpital Necker Enfants-Malades, AP-HP s’intéresse depuis de nombreuses années à la manière dont se répare notre ADN, notamment au cours de la maturation du système immunitaire.
Les défauts de réparation lors du processus de recombinaison V(D)J sont responsables de nombreuses maladies. Parmi celles-ci, on peut citer l’ataxie télangiectasie, qui entrave le développement neurologique et rend vulnérable aux infections, aux cancers. Elle concerne environ 1 naissance sur 100 000.
En recherche comme en clinique, la rareté et la fragilité des échantillons compliquent le diagnostic. Face à ces difficultés, l’équipe de MM Revy et de Villartay a cherché à développer un biomarqueur robuste, capable d’orienter la recherche de gènes candidats ou de confirmer leur effet pathogène à partir d’une faible quantité d’échantillon.
Les chercheurs ont établi qu’à partir de l’étude d’un sous-ensemble du répertoire des lymphocytes T il était possible d’extraire 9 paramètres permettant de révéler des signatures très spécifiques des déficits immunitaires primaires liés à des défauts de la recombinaison V(D)J ou de réparation de l’ADN, notamment en présence d’une ataxie télangiectasie ou du syndrome de Nijmegen. On peut voir sur le graphe ci-dessous que les différentes signatures définissent des groupes distincts.
Eviter aux malades un traitement qui leur serait fatal
Cette découverte est capitale pour des patients immuno-déficients susceptibles de recevoir une greffe de moelle osseuse, seul traitement curatif à ce jour. En effet, le conditionnement préparatoire à la greffe peut leur être toxique s’ils ont une mutation affectant les voies de réparation de l’ADN.
De même, chez les patients souffrant de cancer, la détection d’un profil « AT/NBS » avec le biomarqueur PROMIDISα pourra éviter la prescription de chimiothérapies potentiellement fatales.
Ainsi, grâce à une collaboration étroite avec des médecins de l’Hôpital Necker-Enfants malades AP-HP, de l’hôpital Robert-Debré AP-HP, de l’hôpital Saint-Louis AP-HP et de l’Institut Curie, le recours à PROMIDISα a déjà orienté ou confirmé le diagnostic moléculaire de patients.
Conseil génétique des enfants atteints d’ataxie télangiectasie
C’est aussi une avancée importante pour les patients atteints d’ataxie télangiectasie (AT). Cette pathologie reste silencieuse et difficile à identifier durant les premières années de vie de l’enfant. Mais elle les rend très vulnérable aux infections. Un dépistage précoce de ces malades, notamment par PROMIDISα, permet le suivi de leur statut immunologique d’une part et le conseil génétique pour les familles concernées.
C’est pourquoi les chercheurs envisagent de promouvoir l’utilisation de PROMIDISα en complément du dépistage néonatal des déficits immunitaires combinés sévères. Une orientation précoce du diagnostic permettrait d’améliorer la qualité et l’espérance de vie de ces enfants.
Cette découverte a fait l’objet d’une publication dans le Journal of Allergy and Clinical Immunology le 12 juin 2018.
A propos de l’Institut Imagine :
Figurant parmi les premiers pôles européens de recherche, de soins et d’enseignement sur les maladies génétiques, l’Institut Imagine, à l’hôpital Necker-Enfants malades AP-HP, a pour mission de les comprendre et les guérir. L’Institut rassemble 850 des meilleurs médecins, chercheurs et personnels de santé dans une architecture créatrice de synergies. C’est ce continuum inédit d’expertises, associé à la proximité des patients, qui permet à Imagine de faire des découvertes au bénéfice des malades.
Les quelques 9000 maladies génétiques recensées touchent 35 millions de patients en Europe, et près de 3 millions en France, où l’on compte chaque année 30 000 nouveaux cas. Près de 60 % des enfants reçus en consultation repartent sans diagnostic génétique et 90 % des maladies génétiques n’ont pas encore de traitement curatif. Face à cette problématique majeure de santé publique, le défi est double : diagnostiquer et guérir. www.institutimagine.org/fr
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